POURQUOI ?

Concilier le court-terme et long terme
dans un système de contraintes complexe

Les désirs s’épanouissent selon des possibilités définies par la société

Irène Théry, EHESS

Dans leur action contre les émissions de GES, les acteurs économiques, institutionnels et politiques se heurtent à quatre obstacles critiques que Chronos Global propose de qualifier pour permettre ensuite de les lever :

1. La dissolution de l’action individuelle dans la complexité du système climat

Pour leur part, les entreprises sont également tenues de se conformer aux lois et règlementations par lesquelles les territoires (villes, régions et États) encadrent l’action visant à maitriser les flux de GES.

À leur tour enfin, ces territoires doivent inscrire leurs politiques dans le cadre fixé par les accords multilatéraux dont ils sont signataires, ajoutant un niveau de contrainte décisionnelle supplémentaire pour atteindre les objectifs du GIEC.

Fig 1. : le système climat

Ainsi, tandis qu’on attend des citoyens qu’ils soient les principaux acteurs de la lutte contre les changements climatiques, l’essentiel des actions à mener et des changements à opérer pour réduire l’empreinte climatique globale leur échappe, depuis les normes sociales qui s’imposent aux individus (alimentation, mobilités, logement, cadre de vie, loisirs…) à la décision politique internationale pour contenir à 1,5°C l’élévation des températures d’ici à 2050, aux mesures d’application réellement mises en œuvre.

Dès lors, améliorer l’efficacité de l’action globale contre les changements climatiques impose de pouvoir agir à chaque niveau du système climat et donc de s’adresser à tous les acteurs qui le composent.

2. L’absence de cohérence entre les moyens mis en œuvre par une organisation (financements, technologies…) et ses schémas organisationnels et décisionnels

Tandis que les enjeux climatiques imposent d’agir pour le long terme, les responsabilités des dirigeants économiques, politiques et institutionnels leur imposent au contraire de produire des résultats sur le court terme qui soient mesurables et vérifiables sur la base d’indicateurs d’usage tels que chiffre d’affaire, EBITDA, PIB ou taux d’emplois. C’est pourquoi en dépit du consensus sur la gravité du risque climatique et l’urgence de réduire drastiquement les émissions de GES, l’ensemble des acteurs continuent de buter sur le rapport entre le coût à court terme des actions à mener et l’incertitude de leur impact à long terme : par quoi commencer ? À quels risques économique, financier ou politique ? Selon quels schémas organisationnels et décisionnels ? Avec quelles incitations et pour quelle motivation ? Pour quelles retombées, quelle rentabilité et quel amortissement ?

Autrement dit, l’action globale contre les changements climatiques exige de pouvoir garantir l’efficacité à long terme de l’action des organisations.

3. L’absence de corrélation entre les objectifs de réduction de GES des organisations et les objectifs du GIEC.

Si de nombreuses actions sont mises en œuvre pour contenir les émissions de gaz à effet de serre et si des outils existent déjà pour permettre aux organisations de se fixer des objectifs cohérents avec ceux du GIEC, à ce jour, il n’existe pas de référentiel global qui permette en même temps de vérifier l’efficacité climatique de leurs actions, de mesurer leur performance climatique et d’évaluer la cohérence globale des actions menées au sein du système climat pour atteindre les objectifs du GIEC.

4. La difficulté pour les acteurs financiers d’intégrer la transition climatique dans leurs critères de décision.

Globalement, les organismes financiers ne prennent toujours pas en compte les changements climatiques dans leurs calculs et décisions pour au moins quatre raisons : la compréhension encore récente de leur portée économique ; leur temporalité longue ; la difficulté de pondérer la part de chaque organisation dans les changements climatiques globaux ; la difficulté de calculer la performance climatique des organisations (entreprises, territoires, institutions) et l’efficacité climatique de leurs actions.

Ainsi, à ce jour, l’empreinte climatique des organisations ne peut toujours pas constituer un critère pondérateur de la décision d’investissement ou du coût de l’emprunt. Une situation qui, de facto, limite à son tour le financement de la transition climatique en même temps qu’elle éloigne les investisseurs des projets à risque climatique élevé.

À la lueur de ces constats, il apparait donc que :

  • Pour être globalement efficace, la lutte contre les changements climatiques exige de pouvoir améliorer l’empreinte climatique de tous les acteurs du système climat  (voir Fig. 1)
  • Il ne sera possible d’infléchir la trajectoire globale des émissions de GES et d’atteindre les objectifs du GIEC que si les actions menées par les organisations sont à la mesure de leurs objectifs climatiques de référence et si elles sont efficaces en termes organisationnels et décisionnels.
  • Le financement massif d’actions climatiques impose qu’elles puissent être analysées par les acteurs financiers à l’aune d’un référentiel commun d’indicateurs permettant de calculer leur trajectoire climatique et de pronostiquer l’impact de leurs actions sur le long terme.